Les faits marquants de ce début d’année

A la veille d’une échéance électorale majeure pour la France, l’activité normative et législative dans le domaine du bâtiment a naturellement faibli au cours du trimestre.

Pour autant le volet tertiaire de la RE 2020 doit retenir votre attention tout comme les ajustements du dispositif MaPrime Rénov’ pour faire face à une situation internationale d’une ampleur inédite sur notre continent depuis la fin de la seconde guerre mondiale.

Autres sujets abordés : La fin des appareils de chauffage au fioul et au charbon, le nouveau prêt « avance rénovation », le PTZ maintenu jusqu’à fin 2023 et le Pinel + dont les modalités d’application viennent d’être fixées par décret.

L’avenir s’assombrit

C’est dans un contexte déjà tendu pour tous les acteurs du bâtiment, après deux années de crise sanitaire, une situation de pénurie sur certains matériaux doublée d’une hausse conséquente des prix des matières premières, que les entreprises doivent désormais composer avec le conflit russo-ukrainien.

Ce dernier fait craindre une explosion, déjà en marche, des prix de l’énergie et sa conséquence inévitable sur le coût des matériaux qui vont connaître de nouvelles hausses qui finiront par amener des clients à renoncer à leur projet et ainsi briser l’embellie qui se profilait dès la fin de 2021.

Si le premier trimestre devrait rester correct, la suite s’annonce particulièrement incertaine ce qui fait dire à Olivier Salleron, le président de la FFB, que le bâtiment risque une fois encore de devoir mettre « un genou à terre » avec pour conséquences « des pertes et des bilans dégradés dans le compte des entreprises » mais aussi un « renchérissement du coût des logements » qui pénalisera en priorité les primo-accédants et les jeunes ménages d’ores et déjà confrontés à une érosion de leur pouvoir d’achat.

Bref, le neuf comme la rénovation risque une fois encore de s’effondrer avec à la clé, si cette nouvelle crise s’installe dans la durée, des conséquences sociales certaines.

Alors que la FFB plaide pour « un moratoire sur toutes normes » en pointant notamment la RE 2020 qui participe aussi à la hausse des coûts, Jean-Christophe Repon (président de la CAPEB) voudrait, à quelques semaines de l’élection présidentielle, que la future équipe gouvernementale se pense réellement sur les préoccupations spécifiques aux TPE-PME et fasse en sorte que les lois et les réglementations ne freinent pas leur accès au marché en les faisant crouler un peu plus dans l’administratif au lieu d’être sur leur chantier, ce qui demeure leur aspiration première. « Aujourd’hui, un chef de petite entreprise a parfois la sensation qu’il fait tout sauf de travailler dans le bâtiment » et de plaider pour des mesures réelles d’adaptation et de simplification.

RE 2020 version tertiaire

Alors que la RE 2020 applicable aux bureaux et locaux scolaires primaires et secondaires entre en vigueur le 1er juillet, le décret du 1er mars paru au J.O. du 3 mars arrête les niveaux exigences à laquelle ces bâtiments devront désormais répondre.

Principales valeurs et nouveautés.

A l’instar de son équivalent pour les logements il fixe cinq exigences de résultats : effort à réaliser en matière de besoin bioclimatique, limitation des émissions de gaz à effet de serre induite par les matériaux et l’énergie, limitation de la consommation d’énergie primaire, et enfin des exigences en matière de confort d’été. On retrouve ainsi les trois piliers de ce texte : sobriété énergétique, conception et construction bas carbone, réaction du bâtiment aux fortes chaleurs.

Un nouveau coefficient pour le calcul de l’indicateur Icconstruction

Pour le tertiaire, l’indicateur Icconstruction, qui exprime l’impact sur le changement climatique lié aux composants du bâtiment, à leur transport, leur installation et l’ensemble du chantier de construction, leur utilisation à l’exclusion des besoins en énergie et en eau de la phase d’exploitation du bâtiment, leur maintenance, leur réparation, leur remplacement et leur fin de vie, évalué sur l’ensemble du cycle de vie du bâtiment (50 ans), reçoit une nouvelle modulation pour les bâtiments à usage de bureaux de plus de 1.000 m².

Ce nouveau coefficient de modulation Mipva pour but d’encourager la mise en place de panneaux photovoltaïques sur les immeubles de bureaux neufs en augmentant le coefficient Icconstruction_max.

Le Bbio et le Cep en tertiaire

La formule de calcul du coefficient Bbio ne change pas. Il est toujours exprimé en points, sans unité. Le nouveau décret indique que les valeurs du Bbio_max moyen sont de 95 points en bureaux et de 68 points en locaux d’enseignement primaire et secondaire.

A signaler toutefois, le coefficient de modulation Mbbruit devient nul pour les zones de bruit BR1 et BR2 et passe à 0,4 pour les bâtiments de catégorie 3. En d’autres termes, le fait de ne pas pouvoir ouvrir les fenêtres parce que l’environnement extérieur est bruyant ne donne plus droit à surconsommer pour rafraîchir le bâtiment.

En ce qui concerne l’indicateur CEP, dont la formule ne subit aucune modification, les exigences sont :

  Cep,nr_maxmoyen Cep_maxmoyen
Bureaux 75 kgeqCO2/m² 85 kgeqCO2/m²
Enseignement primaire 65 kgeqCO2/m² 72 kgeqCO2/m²
Enseignement secondaire 63 kgeqCO2/m² 72 kgeqCO2/m²

Le coefficient Icénergie

Le nouveau décret fixe également les plafonds à ne pas dépasser du coefficient Icénergie.

Les valeurs d’Icénergie_maxmoyen sont, en fonction des dates de dépôt des permis de construire :

  2022 à 2024 2025 à 2027 A partir de 2028
Bureaux raccordés à un réseau de chaleur urbain 280 kgeqCO2/m² 200 kgeqCO2/m² 200 kgeqCO2/m²
Bureaux – autres cas 200 kgeqCO2/m² 200 kgeqCO2/m² 200 kgeqCO2/m²
Enseignement primaire ou secondaire raccordé à un réseau de chaleur urbain 240 kgeqCO2/m² 200 kgeqCO2/m² 140 kgeqCO2/m²
Enseignement primaire et secondaire autres cas 240 kgeqCO2/m² 140 kgeqCO2/m² 140 kgeqCO2/m²

Le confort d’été en tertiaire

L’indicateur DH, qui traduit le confort d’été, prend des valeurs différentes en bureaux et en locaux d’enseignement.

DH_maxcat à ne pas dépasser en bureaux :

  Catégorie 1, sauf parties de bâtiments climatisés en zones H2d et H3 Catégorie 1 climatisé en zones H2d et H3 Catégorie 2 Catégorie 3
DH_maxcat 1150 2400 2600 Pas de seuil

DH_maxcat en locaux d’enseignement primaire et secondaire :

  Catégorie 1, sauf parties de bâtiments climatisés en zones H2d et H3 Catégorie 1 climatisé en zones H2d et H3 Catégorie 2
DH_maxcat 900 1800 2200

MaPrime Rénov’ : objectif en hausse et premières mesures d’adaptation à l’exposition des prix de l’énergie et des matériaux

Objectif 2022 : 1.000.000 de primes distribuées

Après une année 2021 euphorique pour le dispositif MaPrime Rénov’ (770.000 dossiers déposés, 670.000 acceptés et plus de 380.000 payés) les Pouvoirs Publics veulent accélérer et vise le million de primes distribuées en 2022.

Pour accompagner ce dynamisme France Rénov’ devient officiellement l’unique service public de la rénovation énergétique. L’agence nationale de l’habitat (ANAH) devient le pilote de la structure qui se dote d’un site internet https://www.France-renov.gouv.fr et d’un numéro de téléphone unique 0 808 800 700 pour faciliter l’information, le conseil et l’accompagnement des ménages.

Les chaudières à gaz sorties du dispositif à compter du 1er  janvier 2023

Le 16 mars dernier Jean Castex, dans le cadre du Plan de Résilience économique et social, a annoncé plusieurs mesures pour soutenir le secteur du bâtiment. Outre une série de mesure visant les entreprises, il a précisé, qu’à compter du 15 avril prochain et jusqu’au 31/12/2022, les aides MaPrime Rénov’ pour l’installation d’appareils de chauffage (pompe à chaleur et chaudières bois) en remplacement de chaudières gaz ou fioul seront augmentées de 1.000 €.

Dans le même temps, Barbara Pompili (Ministre de la Transition écologique) après avoir annoncé la sortie du dispositif des chaudières gaz dès le 1er avril a finalement repoussé l’échéance au 1er janvier 2023 « pour permettre aux ménages et aux entreprises de s’adapter ».

Pour les entreprises, le gouvernement compte lancer début avril un « appel à projet exceptionnel » pour « accélérer la décarbonation de notre industrie ». « Nous souhaitons cibler les entreprises les plus exposées à la hausse des hydrocarbures pour qu’elles accélèrent les projets d’efficacité énergétique ou de substitution du gaz naturel par de la biomasse« , a précisé le Premier ministre.

Appareils de chauffage au fioul ou au charbon interdits

Le projet de décret mis en consultation en janvier 2021 prévoyait un plafond d’émission de Gaz à Effet de Serre (GES) de 250 gCO2eq/KWh PCI. Le nouveau décret n° 2022-8 du 5 janvier 2022 paru au journal officiel du jeudi 6 janvier 2022 fixe en définitive ce plafond à 300 gCO2eq/KWh PCI, aussi bien en construction neuve qu’en remplacement d’un équipement existant.

Ce décret s’inscrit dans la politique menée par le gouvernement pour réduire les émissions de gaz à effet de serre des bâtiments et lutter ainsi contre le changement climatique.

Pas de répercussion dans l’existant

En revanche, les propriétaires d’équipements existants fonctionnant au fioul ou au charbon pourront continuer à les utiliser sans changement de combustible, les entretenir et les faire réparer pour maintenir leur efficacité. La réparation d’une chaudière fioul existante – le changement du brûleur, par exemple – peut la rendre compatible avec du biofioul (un mélange de fioul domestique et d’ester méthylique d’acide gras (EMAG) issu du Colza).

Ils pourront également, s’ils le souhaitent ou lorsqu’ils arriveront en fin de vie, les remplacer par des équipements de chauffage et de production d’eau chaude plus vertueux sur le plan environnemental et plus économiques à l’usage, en ayant recours aux aides financières mises en place à cet effet (les dispositifs des certificats d’économies d’énergie (CEE), dont le « Coup de pouce chauffage » et le « Coup de pouce chauffage des bâtiments tertiaires », mais aussi « MaPrimeRénov’ » versée par l’Anah).

De plus, afin de tenir compte de situations spécifiques et de ne placer aucun ménage en difficulté, des dérogations au seuil de 300 gCO²eq/KWh PCI sont prévues pour les nouveaux équipements de chauffage et de production d’eau chaude sanitaire :

  • en cas de non-conformité des travaux à effectuer à des servitudes ou aux dispositions législatives ou réglementaires relatives au droit des sols ou au droit de propriété,
  • lorsque ni réseau de chaleur, ni réseau de gaz naturel ne sont présents, et qu’aucun équipement compatible avec le seuil ne peut être installé sans travaux de renforcement du réseau local de distribution publique d’électricité.

Bon à savoir

Accession à la propriété : La PTZ maintenu jusqu’à fin 2023

Cette année et jusqu’en fin 2023, les particuliers qui souhaitent accéder à l’acquisition de leur première résidence principale peuvent toujours bénéficier du prêt à taux zéro (PTZ). Les conditions d’obtention sont les mêmes en 2022 que celles qui étaient applicables en 2021.

Il s’agit d’un dispositif de soutien des ménages à revenus modestes et intermédiaires, accordé sous conditions de ressources.

Gratuit, d’une durée de 20, 22 ou 25 ans, avec une période de remboursement différé d’une durée de 5, 10 ou 15 ans durant laquelle aucune mensualité n’est due, le PTZ peut être obtenu uniquement si l’on n’a pas été propriétaire de sa résidence principale au cours des deux dernières années précédant le prêt.

Type de logement

L’acquisition d’un logement neuf ou ancien peut faire l’objet d’un financement par le biais d’un PTZ.

Les logements anciens doivent se situer en zone B2 et C, et nécessiter des travaux représentant au moins 25 % du montant de l’opération à financer pour limiter la consommation énergétique annuelle du logement à 331 KWh/m². 

Le PTZ peut également financer l’acquisition d’un logement faisant l’objet d’un contrat de location-accession. Il est aussi possible d’obtenir un PTZ pour la transformation d’un local (bureau, garage…) en logement, ou l’acquisition d’un logement social existant. 

Plafond de ressources

Les revenus des ménages demandant un PTZ doivent être inférieurs à un plafond qui varie en fonction de la zone du logement et du nombre de personnes destinées à l’occuper. Les ressources prises en compte sont le revenu fiscal de référence de l’année N-2 des personnes qui vivront dans le logement.

Montant du prêt

Le montant du prêt est déterminé en fonction :

  • de la nature du logement (neuf ou ancien) ;
  • du prix d’achat, ;
  • de la zone dans laquelle il se trouve ainsi que du nombre d’occupants dans le logement.

Attention, la part du prix d’achat qui peut être financé via un PTZ varie en fonction de la zone dans laquelle se trouve le bien.

En zones A et B1, les logements neufs peuvent obtenir jusqu’à 40 % de financement mais les logements anciens avec travaux ne sont pas éligibles.

En zones B2 et C les logements neufs peuvent être financés à hauteur de 20 %, les logements anciens avec travaux à hauteur de 40%.

En ce qui concerne les opérations de vente du parc social à ses occupants, le montant du prix d’achat est fixé à 10% du coût total de l’opération.

La demande de PTZ est à adresser à l’établissement de crédit de son choix, comme tout autre prêt. C’est ce dernier qui prend la décision d’accorder ou non le prêt.

Sur le site de l’Agence nationale pour l’information sur le logement (Anil), il est possible d’effectuer une simulation personnalisée en fonction de la composition du foyer, de la localisation du bien, du type de logement et de son coût.

Le prêt « avance rénovation »

Il s’agit d’un prêt hypothécaire garanti par l’Etat consacré au financement de travaux de rénovation énergétiques des logements destiné aux ménages modestes et aux séniors propriétaires de leur résidence principale.

Son mécanisme de remboursement est singulier dans la mesure où, seuls les intérêts seront à rembourser immédiatement. Le reste à charge est dû uniquement au moment de la revente du bien ou de la succession.Ce dispositif vient en complément des aides existantes comme MaPrimeRenov’.

La Banque Postale vient d’en débuter la commercialisation (depuis le 2 février). Il est proposé à un taux fixe de 2 % et ne peut dépasser 70 % de la valeur du bien avant travaux (sur la base d’une expertise d’expert). Pour sa part, le Crédit Mutuel a annoncé sa commercialisation courant mars.

Pinel +, conditions d’éligibilité fixées par décret

Alors que le dispositif Pinel classique prendra fin au 31/12/2024, les investisseurs soucieux de préserver les taux actuels de réduction d’impôts (12 %, 18 % ou 21 % en fonction des durées d’engagement) devront recourir au nouveau dispositif baptisé Pinel +. Le décret du 17 mars fixe le niveau de qualité des logements minimum à respecter pour les années 2023 et 2024.

Pour rappel, le dispositif Pinel classique conserve ses pleins avantages jusqu’au 31/12/2022puis verra les pourcentages de réduction octroyés progressivement revus à la baisse :

  • 10,5 % en 2023, puis 9% en 2024 pour un engagement de 6 ans ;
  • 15% en 2023, puis 9 % en 2024 pour un engagement de 8 ans ;
  •  17,5 % en 2023, puis 14 % en 2024 pour un engagement de 12 ans.

Avec le Pinel +, les critères de qualité des logements sont de deux ordres.

Qualité d’usage du logement

Trois exigences à respecter :

  • Une surface habitable minimale suivant le type de logement : 28 m² pour un T1, 45 m² pour un T2, 62 m² pour un T3, 79 m² pour un T4, 96 m² pour un T5 ;
  • Une surface minimale des espaces extérieurs privatifs ou à jouissance privative, suivant le type du logement : 3 m² pour un T1 ou un T2, 5 m² pour un T3, 7 m² pour un T4, 9 m² pour un T5 ;
  • Une double exposition pour les T3 et plus. 

Critères environnementaux 

Des conditions de performances énergétiques des habitations plus strictes avec ce nouveau dispositif : 

  • Les logements neufs acquis en 2023 devront se conformer à un niveau de performance environnementale en suivant les exigences de la RE 2020 qui entreront en vigueur en 2025 ;
  • Les logements neufs acquis en 2024, ou, pour ceux en construction et qui font l’objet d’un dépôt de demande de permis de construire en 2024, devront, en plus du critère précédent, atteindre la classe A du Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) ;
  • Pour les logements acquis en 2023 et 2024 dans le cadre d’une opération de construction dont la demande de permis de construire a été déposée avant le 1er janvier 2022, date d’entrée en vigueur de la RE 2020, ils devront respecter des critères fondés sur le référentiel E+C-, utilisé pour préfigurer la RE 2020, ainsi que de la classe A du DPE.
  • Pour les logements acquis par les contribuables en 2023 et 2024 dans le cadre d’une opération autre qu’une opération de construction (comme la réhabilitation), et pour laquelle ni la RE 2020 ni le référentiel E+C- ne sont applicables au bâtiment, il est exigé le respect d’une classe A ou B du DPE.